Les autodidactes sont des menteurs

19 octobre 2022 | Points de vue

 » Autodidactes  » : qu’est-ce que cela veut dire ?

Tout commence par une définition…

De mon point de vue, être autodidacte c’est avoir la capacité d’apprendre seul et par ses propres moyens. Sans figure d’enseignement externe, pour ainsi dire. Pas de prof. Pas de mentor. Juste soi et son équipe interne : sa passion, sa motivation et ses ressources, pour atteindre ses objectifs.

Être autodidacte est un acte solitaire, dans le sens où c’est une forme de compétition avec soi-même. L’apprenant que je suis aujourd’hui se base sur ses expériences d’hier pour « s’auto-enseigner », et se garantir que l’apprenant qu’il sera demain soit “meilleur” que celui qu’il est à ce jour. (schéma 1) En somme, le maître et l’élève font quelque part « corps à corps », devant la pensée obsédante que le second est destiné à dépasser le premier.

Schéma 1

Personnellement, Je m’étais toujours considéré comme un autodidacte. C’était, je crois, l’une de mes plus grandes fiertés. Lorsque l’on me demandait « comment as-tu élaboré cette approche ? », je répondais simplement « tout seul, par moi-même ». Alors certes, les compétences que j’ai développées après mon cursus universitaire initial ne sont pas certifiées par un diplôme. Mais au fond : ai-je véritablement appris « tout seul » ?

Pendant longtemps, j’ai évité d’admettre l’évidence qui se cachait derrière le fruit de mon instinct.

Fort de cette autodidaxie, je me suis toujours intéressé à ce qui pouvait se cacher derrière les mécanismes de l’apprentissage. Mais ce sont mes études en biologie, en neurosciences puis sciences cognitives, qui m’ont permis de poser les fondations de ma réflexion sur le développement des modèles et approches pédagogiques que je mets en place aujourd’hui chez Kanyon Consulting

Pour résumer, les neurosciences abordent la question en étudiant deux types de mécanisme d’apprentissage qui entrent en interaction l’un avec l’autre :

  • l’apprentissage dit « par expérience »,
  • l’apprentissage dit « par pairs ».

Le rapport à l’expérience est assez simple…

  • J’identifie d’abord un problème dans l’environnement.
  • Je me base ensuite sur mes expériences pour transférer des éléments partiels de solution à la problématique que je rencontre.
  • Et partir de là, je m’engage dans une série d’actions correctrices, pour trouver une solution adaptée dans un temps imparti (schéma 2).

La somme, et surtout la généralisation des expériences, donnent naissance à une base de connaissances qui me permettra de guider mes prochaines expériences. En retour, ces dernières me permettront d’adapter ma connaissance à de nouveaux contextes.

L’apprentissage ne peut exister qu’à partir du moment où nous pouvons observer le résultat de nos expériences dans un environnement. Il faut voir ce rapport complémentaire comme celui de « la théorie versus l’expérience ». Le premier offre un cadre pour générer des expériences. Tout écart de résultats de l’expérience avec le cadre théorique permettra de challenger puis d’ajuster, si besoin, la théorie. Et ainsi de suite. Et l’autodidacte extrême, lui, vit avec l’illusion qu’il n’apprend que par expérience.

L’apprentissage par expérience permet d’améliorer notre expertises par itération (a gauche). À travers le transfert d’expérience, l’apprentissage par paire permet d’accélérer l’apprentissage par expérience. 

L’apprentissage par expérience :

Il reste le cœur des intelligences. Sans aucun doute, c’est la façon la plus efficace pour ancrer les apprentissages sur le long terme. Mais c’est aussi la plus lente : des dizaines et des dizaines d’années pour développer et parfaire une expertise.

C’est là que l’apprentissage par paire entre en jeu, car il permet l’accélération de l’apprentissage par expérience, en donnant lieu à l’émergence d’une forme d’apprentissage sociétal. Je n’ai plus besoin de recommencer à zéro : je me base sur les expériences et les connaissance des autres pour développer et accélérer mes savoir-faire et, par extension, mes cultures (schéma n°3). Si l’apprentissage par expérience est au cœur de mes intelligences individuelles, l’apprentissage par paire est quant à lui au cœur d’une intelligence collective.

L’apprentissage par pairs :

Il a donc pour objectif d’accélérer l’apprentissage par expérience, en l’accompagnant de trois façons : 

  • Par mimétisme, c’est à dire la capacité à reproduire et ajuster les actions des autres par l’observation. 
  • Par transfert, c’est à dire la capacité à comprendre les connaissances des autres pour guider nos propres expériences.
  • Et enfin par reproduction. 

C’est cette troisième dimension qui m’avait filé entre les doigts pendant toutes ces années. Ou, peut-être l’avais-je laissé filé volontairement. Toutes les interprétations sont bonnes.

Encore une fois, la finalité de tout apprentissages est la génération sans fin de nouvelles expériences. Son rôle est d’alimenter des séries d’actions imparfaites sur un environnement par des connaissances acquises. La finalité de l’apprentissage est de produire des « livrables » par l’intermédiaire de gestes. Ces livrables peuvent prendre plusieurs formes : Un livre par l’écriture, de la matière, des lignes de codes, une sculpture, du dessins ou de la peinture etc. Tous produits par l’intermédiaires de gestes techniques. Ces productions sont le résultat croisées des expériences passées et des visions de leurs producteurs.

Mais dés lors qu’elles existent dans un monde sensoriel, elles n’appartiennent plus à leur créateurs mais font partie intégrante de l’environnement observable par soi mais aussi par les autres. Lorsqu’on parle donc de reproduction, l’idée est de se servir des œuvres des autres pour inspirer nos apprentissages, nos idées, nos fantasmes, nos besoins ou notre technique.

Caption : Un créateur (1) créer une production (2) qui sert d’inspiration à un autre créateur (3) pour lui même produire une création (4) qui servira d’inspirations à d‘autres.

Ces productions, aujourd’hui, nous les appelons immeubles, chaussures, bouteille, roman, clavier, bitume, écran, dessin-animé etc. Ces productions constituent aujourd’hui 100% de notre environnement.

Alors oui… 

Un autodidacte peut dire qu’il apprend par expérience car il travaille avec l’objet qu’il désire maitriser. Il peut dire qu’il n’apprend pas par mimétisme car il n’a pas de maitre. I peut dire qu’il n’apprend pas par transfert, car il ne lit pas ni ne regarde des « tuto » sur YouTube.

Mais peut-il dire qu’il ne s’inspire pas involontairement des œuvres des autres ?

#foodforthoughts

Guillaume DECHAMBENOIT.

 

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